Le gentrification, facteur clef pour une requalification durable des centres historiques : cas de la médina de Rabat

Abstract

médina - tissu historique - dans ses valeurs de témoignage d’un passé collectif, est un espace riche de sens, de culture mais aussi d’usage pour ses héritiers. Ceux-ci sont donc non seulement les conservateurs mais aussi les principaux utilisateurs. Pour sauvegarder ce patrimoine et assurer à la population qui y habite de bonnes conditions de vie, il faut le réintégrer dans la vie quotidienne de la communauté. L’affirmation des relations intrinsèques entre le patrimoine urbain et ses utilisateurs - ses habitants - aurait pu contribuer à le faire participer dans la vie urbaine. Mais, le choix d’une attitude passive définissant la sauvegarde du patrimoine urbain dans sa conception la plus restreinte, et surtout orientant les actions vers la "momification" de cet espace, a contribué à le couper de la ville et de la vie urbaine. « Il ne suffit pas d’entretenir et de restaurer quelques mosquées, quelques médersas et quelques palais, il faut encore préserver leur environnement. En faire des villes musées ne serait pas une solution; les hommes qui vivent dans ces quartiers ont droit, tout autant que les autres, aux avantages du modernisme. Et quoi de plus mort qu’un musée, quelles que soient les richesses qui s’y accumulent » André Adams (1982). Le présent travail est une réflexion sur cet espace visant à mener des actions profondes de façon à arrêter sa dégradation et inverser la tendance actuelle. Rabat, capitale du Maroc, est aujourd’hui une ville diffuse sous l’effet de l’étalement urbain, les activités et grands équipements situés autrefois au centre (historique) sont déplacés vers la périphérie et les populations préfèrent de plus en plus la périphérie : le centre se paupérise. Par ailleurs, la ville connait un grand problème de pénurie du foncier ce qui motive la spéculation immobilière : les "riches" s’installent dans les quartiers de haut standing (Agdal, Riad et Souissi), les "pauvres" se déplacent aux zones d’urbanisation nouvelle et la classe moyenne est dans l’impasse, elle ne peut se permettre les logements haut standing dont les prix avoisinent les 1200 euros le m², ni les logements sociaux. Autre donnée importante, les résultats des deux derniers recensements (1994 et 2004) montre un mouvement de départ de la population de la médina. Ces éléments réunis rappellent ceux observés dans les études du phénomène de gentrification. Aussi, une opportunité tout à fait particulière, c’est la gentrification spontanée observée dans les médinas de Marrakech et Essaouira et qui nous fournit une expérience rarement disponible dans le domaine de l’urbanisme. C’est pourquoi nous avons cherché à mieux comprendre ce phénomène, sa genèse, ses effets et ses explications (théories). Les conclusions affirment que la gentrification, si elle est contrôlée et maîtriser par les pouvoirs publics, est la solution clef pour requalifier les médinas et les faire participer au développement de la ville. Ainsi, le travail débouche sur la définition d’un "Programme de Requalification de la Médina" de Rabat, comme projet pilote. Ce programme se veut une série d’actions à mener à différents niveaux : restauration, réutilisation, réaménagement et aussi construction neuve, car activité conservatrice et démarche créatrice ne peuvent être séparées sans perte de sens de la première et stérilisation de la seconde et, vu que l’usage de la médina est lié à des pratiques urbaines et sociales qui ne cessent d’évoluer, on ne peut prétendre conserver ce patrimoine urbain qu’en agissant de façon profonde dans une vision globale.