Myxosporidies (Myxozoa: Myxosporea) parasites de quelques Téléostéens du bassin du Noun (Région de l’Ouest, Cameroun) : taxinomie et biologie des espèces inféodées à Oreochromis niloticus Linné, 1758 et Labeo sp.

Abstract

Afin d’assurer le développement durable du secteur piscicole, il est important pour tout projet de développement de la pisciculture de tenir compte des pathologies liées au parasitisme des poissons hôtes. C’est dans cette optique que nous avons entrepris l’étude taxinomique des Myxosporea, Bütschli (1881) parasites de quelques Téléostéens du bassin du Noun (Région administrative de l’Ouest Cameroun) d’une part et la biologie des espèces inféodées à Oreochromis niloticus Linné, 1758 et Labeo sp. en milieux naturel et piscicole d’autre part. L’intérêt économique d’O. niloticus et son utilisation généralisée en pisciculture font de cette espèce l’une des plus importantes en Afrique. Labeo sp. est également l’une des espèces les plus consommées au Cameroun. De 2006 à 2009, l’examen de 1133 poissons d’eau douce (rivières, barrages de retenues et étangs piscicoles) appartenant à 9 genres et 6 familles a permis de mettre en évidence la parasitofaune des Myxosporidies des différentes espèces hôtes. L’étude de la structure et de la dynamique des populations parasitaires d’O. niloticus en milieux naturel et piscicole et de Labeo sp. en milieu naturel a été menée de mai 2008 à juin 2009. L’examen (fondé sur les techniques d’autopsie) des poissons appartenant aux familles des Mormyridae (1 espèce), Cichlidae (2), Cyprinidae (3), Channidae (1), Mochokidae (2), Bagridae (3) a révélé la présence d’une faune myxosporidienne riche et diversifiée. Au total, 24 espèces de Myxosporidies appartenant aux genres Myxidium Bütschli, 1882, Myxobolus Bütschli, 1882, Henneguya Kudo, 1933 et Thelohanellus Thélohan, 1892 ont été récoltées. Toutes les deux espèces de Myxidium (Myxidium nyongensis Fomena & Bouix, 1986 et Myxidium clariae Landsberg, 1987) trouvées chez nos hôtes parasitent la vésicule biliaire. C’est un cas de spécificité d’un organe. Seules les spores mâtures de ces espèces flottant librement dans la bile ont été retrouvées. Parmi les parasites récoltés, quatre espèces (Myxobolus kouoptamoensis n.sp. Myxobolus nchoutnounensis n.sp. Myxobolus njoyai n.sp. et Myxobolus bankouopi n.sp.) sont nouvelles pour la Science. Thelohanellus bicornei Kabré, Sakiti, Marquès & Sawadogo, 2002 (parasite de Labeo sp.) a été redécrite et sa diagnose complétée. La présence de certaines espèces parasites telles que Myxobolus bilongi Fomena, Marquès, Bouix & Njiné, 1994, Thelohanellus assambai Fomena, Marquès, Bouix & Njiné, 1994 et Thelohanellus sanagaensis Fomena, Marquès Bouix & Njiné, 1994, parasites de Labeo sp. au Cameroun a été confirmée chez leurs hôtes d’origine. Certains parasites antérieurement décrits ont été retrouvés chez de nouveaux hôtes: c’est le cas de Myxobolus nyongana Fomena, Bouix & Birgi, 1986 parasite de Barbus martorelli Roman, 1971 et de Labeo sp. et Myxobolus nounensis Fomena & Bouix, 2000 récoltés chez les cichlidae. Le polyparasitisme chez les espèces O. niloticus et Labeo sp. a été noté : O. niloticus porte dix (10) espèces de Myxosporidies appartenant toutes au genre Myxobolus ; Labeo sp. héberge aussi dix (10) espèces de Myxosporidies appartenant aux genres Myxobolus (6 espèces), Thelohanellus (3) et Myxidium (1). L’étude de la biologie des espèces parasites inféodées à O. niloticus capturé dans les étangs piscicoles de Foumban et dans la rivière Noun à Kouoptamo a montré que : Myxobolus kainjiae Obiekezie & Okaeme, 1990 et Myxobolus sarigi Landsberg, 1985 sont rares dans les deux sites d’étude, Myxobolus tilapiae Abolarin, 1974 et Myxobolus equatorialis Landsberg, 1985 rares respectivement à Foumban et à Kouoptamo seulement. Par contre, Myxobolus agolus Landsberg, 1985, Myxobolus brachysporus Baker, 1963, Myxobolus camerounensis Fomena, Marquès & Bouix, 1993, Myxobolus heterosporus Baker, 1963 et Myxobolus israelensis Landsberg, 1985 étaient secondaires dans les deux sites, alors que M. tilapiae est apparue peu fréquente dans la rivière Noun uniquement et enfin M. equatorialis secondaire en bassin piscicole. Myxidium nyongensis, Myxobolus bilongi et Thelohanellus sanagaensis sont apparus rares chez les individus de Labeo sp., capturés sur le Noun. Myxobolus kouoptamoensis, M. bankouopi, M. barbi et T. bicornei sont secondaires alors que M. njoyai et M. nchoutnounensis sont apparues principales. Les taux de parasitisme sont généralement plus élevés dans les étangs piscicoles que dans la rivière Noun. Les charges kystiques moyennes sont très faibles (x̄ < 10) pour M. bilongi, M. njoyai et M. bankouopi, elles sont faibles (10≤ x̄<50) pour M. kouoptamoensis, T. assambai et moyennes (50 ≤ x̄≤ 100) pour M. barbi. Tous les organes du poisson hôte sont les sites potentiels d’infestation. En cas d’infestation sévère, M. barbi et M. kouoptamoensis (parasites des branchies) gêneraient la respiration. M. nchoutnounensis parasite des yeux peut altérer la vue de leurs hôtes et M. kainjiae qui infeste les gonades peut réduire la fécondité des poissons affectés. Le genre Myxobolus (avec 65,2% des espèces récoltées) prédomine dans la faune des Myxosporidies des poissons examinés. La presque totalité des Myxosporidies récoltées chez O. nilotius et Labeo sp. infestent indifféremment les mâles et les femelles. Les taux d’infestation par M. israelensis sont plus élevés en saison pluvieuse chez les poissons capturés aussi bien dans les étangs piscicoles que chez les populations d’hôtes sauvages. Les prévalences d’infestation de M. camerounensis sont élevées en saison des pluies à Foumban. Chez Labeo sp., l’occurence de M. kouoptamoensis est élevée pendant la saison sèche. On note l’absence d’une corrélation significative entre les taux d’infestation parasitaire et la taille d’O. niloticus dans la rivière Noun alors que dans les étangs piscicoles, M. agolus, M. brachysporus et M. heterosporus infestent plus les hôtes âgés alors que M. israelensis affectionne les plus jeunes hôtes. Il existe une corrélation positive et significative entre la taille de Labeo sp. et les charges kystiques moyennes de M. barbi et M. kouoptamoensis.