Caractérisation des formes matures de dissémination des Protozoaires et Helminthes intestinaux dans le réseau hydrographique de la Mezam (Région du Nord-Ouest, Cameroun) et influence des variables abiotiques

Abstract

Les Protozoaires et Helminthes intestinaux présentent des formes de résistances variées dans l’environnement aquatique (kystes, oocystes, oeufs et larves). Leur présence dans les eaux de surface constitue un problème de santé publique et devrait faire l’objet d’une attention particulière. La maîtrise des étapes de maturation de ces parasites ainsi que la compréhension des facteurs abiotiques qui favorisent leur distribution dans l’eau sont nécessaires pour comprendre leur écologie et leur contribution dans l’activation, la viabilité et la transmission des infections. C’est dans ce sens que cette étude visant à caractériser les formes matures de dissémination des Protozoaires et Helminthes intestinaux en relation avec la qualité physico-chimique de l’eau a été menée dans le réseau hydrographique de la Mezam à Bamenda. Plus spécifiquement, il s’est agi de mesurer les principaux paramètres hydrologiques et physico-chimiques des eaux de ce bassin versant, caracteriser les différentes formes environnementales des Protozoaires et Helminthes entéropathogènes des eaux de la Mezam et évaluer l’influence des paramètres physico-chimiques sur la distribution et la maturation des parasites intestinaux dans ces milieux aquatiques. Treize stations d’échantillonnage, réparties en 3 stations pour chaque cours d’eau (Mufueh, Formuki, Mankon et Ayaba) et 1 station sur la rivière réceptrice (Mezam) ont été retenues. Dans chacune de ces stations, 13 campagnes d’échantillonnage ont été effectuées de janvier 2017 à janvier 2018 suivant un pas de prélèvement mensuel. Les paramètres hydrologiques, physico-chimiques et les métaux lourds ont été analysés sur le terrain et au laboratoire suivant les méthodes standards. L’isolement, l’identification et le dénombrement des parasites ont été effectués à l’aide du microscope optique aux grossissements 40x et 100x après concentration et coloration des éléments parasitaires suivant les techniques de sédimentation directe, de Kato-Katz, de Ritchie et de Ziehl-Neelsen. Les taux de maturation ont été calculés chez les espèces Ascaris lumbricoïdes, Strongyloïdes sp., Isospora belli et Cyclospora cayetanensis. Les résultats des analyses physico-chimiques montrent que le cours d’eau Mufueh et la rivière Mezam, situés aux périphéries de la ville et caractérisés par une végétation abondante sur les berges, ont des eaux bien oxygénées (65,57 ± 3,56 %), des faibles valeurs de température (19,61 ± 1,59 °C), une faible minéralisation (61,94 ± 41,20 μS/cm) et une faible pollution organique (2,41 ± 1,71 mg/L). Ces eaux sont soumises à des pollutions domestiques et agricoles. Par contre, les cours d’eau Formuki, Mankon et Ayaba qui traversent la zone urbanisée, montrent une pollution organique modérée à forte (2 ≤ IPO ≤ 3,6), avec des températures (22,05 ± 2,14 °C) et une minéralisation (185,37 ± 122,71 μS/cm) plus élevées. Ces eaux urbaines sont soumises à des pollutions domestiques, municipales et agricoles ; et présentent des valeurs plus élevées en ions (16,31mg/L) et en éléments traces métalliques (5858 μg/kg) dans les sédiments. Les analyses biologiques ont permis d’identifier et de caractériser chez les Protozoaires entéropathogènes, 9 espèces de parasites intestinaux appartenant à 4 classes. La classe des Sporozoaires a dominé avec les espèces Cryptosporidium spp. (99 Oocystes/L), Cyclospora cayetanensis (94 Oocystes/L), Isospora belli (54 Oocystes/L) et Sarcocystis hominis (31 Oocystes/L). Elle est suivie par la classe des Rhizopodes représentée par les espèces Entamoeba coli (71 Kystes/L) et Entamoeba histolytica (63 Kystes/L). Ensuite viennent la classe des Flagellés avec les espèces Giardia sp. (65 Kystes/L) et Chilomastix mesnili (7 Kystes/L) ; et enfin la classe des Ciliés représentée par l’espèce Balantidium coli (42 Kystes/L). La distribution spatiotemporelle des Protozoaires entéropathogènes montre des densités élevées au mois de mars en saison des pluies dans les stations Muf-amont, Aya-milieu, Mnk-amont et Mez-potamon ; et des faibles densités dans les stations Aya-aval, For-aval et Muf-milieu. Les taux de maturation ou de sporulation sont respectivement de 37,55% et 39,58% pour Isospora belli et Cyclospora cayetanensis et sont plus élevés en saison sèche. Les analyses statistiques montrent que les densités des Protozoaires et des oocystes matures sont corrélées positivement avec les matières en suspension et l’oxygène dissous et négativement avec les ions Ca2+, Mg2+, Cl-, K+, HCO3- et NO3- (p≤0,05). Chez les Helminthes entéropathogènes, les analyses biologiques ont permis d’identifier et de caractériser 10 espèces de parasites intestinaus appartenant à 3 classes. Il s’agit par ordre décroissant de densité de la classe des Nématodes avec les espèces Strongyloïdes sp. (141 Larves/L), Ascaris lumbricoïdes (59 OEufs/L), Enterobius vermicularis (9 OEufs/L), Ancylostoma sp. (2 OEufs/L) et Trichuris trichiura (2 OEufs/L) ; de la classe des Cestodes avec les espèces Tænia sp. (30 OEufs/L), Diphyllobothrium latum (25 OEufs/L) et Hyménolepis sp. (11 OEufs/L) et enfin de la classe des Trématodes représentée par les espèces Schistosoma haematobium (2 OEufs/L) et Fasciola hepatica (1 OEuf/L). Les stations Mnk-aval, Aya-amont, Muf-amont, Muf-milieu et Mez-potamon ont été les plus contaminées par les oeufs et larves d’Helminthes entéropathogènes ; tandis que Muf-aval, Foramont et Mnk-amont sont les stations qui ont montré les faibles densités de ces parasites. Les taux de maturation sont de 66,35% pour les oeufs d’Ascaris lumbricoïdes et de 28,48% pour les larves de Strongyloïdes sp. et sont plus élevés en saison des pluies, montrant le rôle de l’humidité dans la maturation des oeufs et larves d’Helminthes entéropathogènes. Les analyses statistiques (p≤0,05) montrent que les oeufs et larves d’Helminthes ont des corrélations négatives avec la température, la salinité, les métaux lourds et affectionnent les milieux ayant une pollution organique faible ou modérée et riche en oxygène dissous. Ceci montre l’effet de bioaccumulation des métaux lourds par les parasites intestinaux dans l’eau. Le respect des règles d’hygiènes élémentaires et le traitement des eaux avant tout usage réduiraient le risque de contamination de la population.