Distribution spatio-temporelle des formes de résistance et de dispersion des helminthes parasites intestinaux de l’homme dans les eaux souterraines de quelques localités de la région du Centre

Abstract

Le manque d’eau potable à l’échelle nationale depuis plusieurs années a engendré ces derniers temps la prolifération des puits et de sources en zone périurbaine de la région du Centre Cameroun. Cependant, ces eaux pourraient héberger de nombreux agents pathogènes responsables de plusieurs maladies parmi lesquelles les helminthiases. Il serait nécessaire d’apporter d’amples informations sur la qualité des eaux fréquemment consommées par les populations. C’est dans ce sens que cette étude, visant à évaluer la distribution spatio-temporelle des formes de résistance et de dispersion des helminthes intestinaux dans les eaux souterraines de quelques localités de la région du Centre, a été menée dans les villes de Mbankomo, Mbalmayo, Okola et Soa. Plus spécifiquement, il s’est agi de déterminer les paramètres morphométriques et hydrologiques des puits et des sources; d’évaluer les paramètres physico-chimiques des eaux des sources et des puits et de rechercher les formes de résistance et de dispersion des helminthes présents dans ces eaux. Pour cette étude, 32 points d’eau ont été retenus, répartis en 16 puits et 16 sources soient 04 puits et 04 sources par localité. Les échantillonnages ont été effectués d’août 2018 à août 2019 suivant une fréquence de deux prélèvements par saison. Les analyses physico-chimiques ont été réalisées à l’aide des techniques et appareils appropriés. L’observation des œufs et larves d’helminthes a été faite au microscope inversé de marque Olympus CK2, à l’objectif 40X après concentration des échantillons suivant les techniques modifiées de concentration formol-éther et Kato-Katz. Des analyses morphométriques et hydrologiques réalisées, il ressort que les puits de la localité de Soa sont les plus profonds par rapport aux puits des trois autres localités. Les épaisseurs de la couche d’eau et les débits d’écoulement de l’eau ont été plus importants pendant les saisons pluvieuses (1,98 ± 0,42 m et 0,0838 ± 0,0386 m3/s) comparativement aux saisons sèches (1,54 ± 0,24 m et 0,03045 ± 0,0150 m3/s). Les analyses physico-chimiques quant à elles ont révélé que les eaux des sources et des puits sont légèrement acides (6,23 ± 0,51 et 6,08 ± 0,50 UC respectivement dans les puits et les sources). Dans l’ensemble, les eaux ont présenté une oxygénation moyenne (57,56 ± 11,96 % pour les puits et 58,65 ± 6,88 % pour les sources) et une pollution organique faible. Par contre, certains points d’eau exposés à des sources de pollution diverses ont montré que les eaux sont de mauvaise qualité. Ces eaux ont été très colorées (189,75 ± 225,24 et 71,75 ± 25,78 Pt-Co respectivement pour la source BS1 et le puits BP3 à Mbankomo; 104,25 ± 31,79 Pt-Co pour le puits OP1 à Okola; 59,75 ± 41,76 et 35,13 ± 19,04 Pt-Co respectivement pour les puits MP1 et MP4 à Mbalmayo), très turbides (52,00 ± 41,78 et 21,75 ± 19,44 FTU respectivement pour la source BS1 et le puits BP3 à Mbankomo; 31,38 ± 14,12 FTU pour le puits OP1 à Okola; 26,13 ± 25,31 et 16,63 ± 7,10 FTU respectivement pour les puits MP1 et MP4 à Mbalmayo; 12,75 ± 3,39 FTU pour la source SS1 à Soa) et riches en matières en suspension (41,25 ± 34,32 et 8,50 ± 4,98mg/L respectivement pour la source BS1 et le puits BP3 à Mbankomo; 8,88 ± 9,82 et 10,38 ± 3,53mg/L pour les puits MP1 et MP4 à Mbalmayo; 5,63 ± 0,68 mg/L pour la source SS1 à Soa). Elles ne pourraient donc être recommandées pour usage domestique voire comme eau de boisson. Les analyses biologiques ont permis de recenser les oeufs et larves d’helminthes intestinaux appartenant à huit genres (Ascaris, Enterobius, Ankylostoma, Trichostrongylus, Strongyloides, Taenia, Fasciola et Schistosoma) avec des densités moyennes de 7 ± 0,88 oeufs/L pour Ascaris sp.,5 ± 0,46 oeufs/L pour Enterobius sp., 5 ± 0,46 oeufs/L pour Ankylostoma sp., 4 ± 0,38 oeufs/L pour Taenia sp., 5 ± 0,85 larves/L pour Strongyloides sp., 4 ± 0,46 oeufs/L pour Trichostrogylus sp., 5 ±0,34 oeufs/L pour Fasciola sp. et 5 ± 0,69 oeufs/L pour Schistosoma spp..Tous les points d’eau étudiés dans les localités de Mbalmayo, Mbankomo, Okola et Soa ont hébergé les œufs et les larves d’helminthes. Les densités les plus élevées ont été obtenues pendant la grande saison des pluies comparativement aux autres saisons. Les différentes classes de taille des oeufs et larves d’helminthes recensées n’ont pas varié significativement d’une saison à une autre. La hiérarchisation des paramètres physico-chimiques a montré que la conductivité électrique et les solides totaux dissous ont occupé le premier rang parmi les paramètres abiotiques primordiaux influençant la dissémination des oeufs et des larves d’helminthes dans les eaux souterraines tandis que les nitrates et les orthophosphates se situent au deuxième rang. La couleur, la turbidité, l’oxydabilité, l’azote ammoniacal, le pourcentage de saturation en oxygène et le Potentiel d’Oxydo- Réduction quant à eux occupent le troisième rang dans la classification hiérarchique. L’ensemble de ces résultats montre sans équivoque la dégradation de la nappe phréatique de quelques localités de la région du Centre et la contamination par les formes de résistance et de dispersion des helminthes. La qualité physico-chimique détériorée de ces eaux et les densités élevées des oeufs et des larves d’helminthes intestinaux exposeraient les populations de ces localitésà des risques sanitaires accrus et augmenteraient de ce fait les coûts de traitement de l’eau. Les résultats révèlent un niveau très précaire de l’assainissement des localités étudiées. Il est impératif pour les pouvoirs publics en collaboration avec les chercheurs, de prendre des mesures appropriées pour protéger et restaurer ces milieux en vue d’une gestion efficace et durable des ressources en eau et de tenir compte des différentes classes de taille des oeufs et larves d’helminthes lors de la mise sur pied des filtres à eau. Aux populations, de changer de mentalités en adoptant des attitudes écologiquement responsables afin d’empêcher la contamination de la nappe d’eau superficielle.