Relations de pouvoir, tensions socio-institutionnelles et production de nouvelles territorialités d’articulation De foi dans le protestantisme au Cameroun : Le cas de l’Eglise Presbytérienne Camerounaise

Abstract

Les tensions qui ont souvent structuré historiquement le champ religieux protestant sont d’ordre doctrinal et dues aux désaccords herméneutiques sur l’enseignement de la Bible. Mais il s’observe depuis quelques années dans le protestantisme au Cameroun, des tensions d’un genre nouveau : les tensions socio-institutionnelles. L’Eglise Presbytérienne Camerounaise (EPC) fait face en son sein à une émergence permanente de ces tensions liées volontairement ou non à l’idée de production d’une nouvelle territorialté d’articulation de foi, ce qui est étonnant au regard de son organisation, de sa forme de gouvernement, de sa constitution et de ses statuts qui définissent son fonctionnement. Sa forme de gouvernement par ailleurs et en termes d’illustration repose sur la démocratie semi représentative et parlementaire. Dès lors, il s’est posé une question principale relative aux fondements de ces tensions socio-institutionnelles dans l’EPC. La recherche menée, et à partir des données qualitatives collectées sur le terrain et analysées sous l’angle de la sociologie historique, de la théorie de la sortie, de la protestation et de la loyauté, ainsi que de l’analyse stratégique, montre que l’exercice du pouvoir ecclésiastique à des profits personnels, la quête de notabilité et le développement d’une mentalité digestive constituent la matrice de ces tensions. Si celles-ci dans le temps long, traduisent l’émergence d’une opinion plurielle et d’une civilité critique dans l’espace public confessionnel en plein contexte colonial ou en contexte de dictature à parti unique après l’indépendance officielle du Cameroun, il est aussi constaté que les fidèles de l’EPC, pendant ces tensions, développent des comportements qui oscillent entre la sortie dans une instance ecclésiastique, la prise de parole au sein de la territorialité de foi ou la loyauté envers elle. La démocratie, bien qu’étant observée à l’EPC, est souvent dans les faits, falsifiée voire fraudée par l’action des lobbies et des groupes de pression qui se constituent dans ces circonstances, et développent des stratégies pour exercer une influence latente ou ouverte à des fins de canaliser l’exercice du pouvoir ecclésiastique dans leurs intérêts. Le pasteur de l’EPC, censé être l’entrepreneur de morale en situation de tensions, en est plutôt l’acteur majeur et développe de façon ouverte un éthos de la manducation. Il joue toujours, comme acteur, sur plusieurs cartes et à partir de ses zones d’incertitude pour finir par trouver une position satisfaisante en fonction de ses intérêts et motifs d’action. Ces tensions participent donc à la fabrication quotidienne de la précarité de l’EPC.