Être jeunes filles, faire face aux difficultés et réussir sa scolarité dans les zones d’éducation prioritaire : le cas des jeunes filles du Lycée de Bétare-Oya à l’Est

Abstract

L’objectif de cette étude est de rendre compte, à partir des entrevues individuelles (non directives), des discours des jeunes filles qui réussissent dans un contexte de scolarité difficile et de décrire la manière dont elles se débrouillent pour produire du succès scolaire, là où la majorité des filles vivant dans les Zones d’Éducation Prioritaire (ci-après : ZEP) échoue ou décroche très souvent sans avoir obtenu le certificat d’étude primaire et élémentaire (CEPE). Cette description s’est articulée autour des thèmes en lien avec la capacité et le pouvoir d’agir des jeunes filles en situation de scolarité difficile : les jeunes filles en situation de vulnérabilité (sociale, économique) et en situation d’apprentissage dans un contexte de scolarité difficile. L’étude est ethnographique et repose sur un devis de recherche qualitatif, faisant appel aux entrevues individuelles, comme technique de collecte des données. La méthode de l’analyse de contenu, articulée aux analyses structurales, a été utilisée pour analyser les données. Les résultats indiquent un ensemble de mécanismes que certaines jeunes filles du Lycée de Bétare-Oya issues des origines sociales défavorisées mettent en place pour réussir leur scolarité, là où la majorité de la même localité échoue. Entre autres mécanismes, les résultats soulignent que les jeunes filles font recours au travail en groupe, aux cours de répétitions et au travail avec les ainés académiques. Ces mécanismes sont en réalités des tactiques qu’elles mettent en place pour réussir face aux difficultés d’apprentissage qui sont, suivant l’intuition de De Certeau (1990), les « arts de faire ». Ces tactiques sont des ruses qu’utilisent les filles pour s’en sortir, afin de se reconstruire sur le plan identitaire et augmenter leur pouvoir d’agir sur elles-mêmes et sur leur environnement.