Diversité de la faune Anophélienne et épidémiologie du Paludisme en zone de résistance aux Pyréthrinoïdes : cas de trois districts de santé du Nord Cameroun

Abstract

La résistance des vecteurs du paludisme aux pyréthrinoïdes fait craindre la perte de l’efficacité des moustiquaires pour la plupart au Cameroun imprégnées de la deltaméthrine. Afin de mesurer l’effet de cette résistance d’Anopheles gambiae sensu lato (s.l.) sur l’épidémiologie du paludisme, des études transversales (entomologiques et parasitologiques) ont été effectuées de 2011 à 2014 dans 38 villages de la Région du Nord-Cameroun durant la saison de haute transmission. Le protocole de l’OMS a permis de tester la sensibilité d’An.gambiae s.l à la deltaméthrine. Parallèlement, des anophèles collectés sur appât humain et au pyrèthre ont respectivement permis de déterminer par des méthodes immunologiques le taux d’infection et le taux d’anthropophilie des différentes espèces. L’identification des anophèles infectés par Plasmodium falciparum a permis de mesurer le niveau de transmission du paludisme par la détermination du taux d’inoculation entomologique. Les ovaires d’une proportion des anophèles collectés sur appât humain ont été disséqués pour la détermination de l’âge physiologique. Les anophèles membres du complexe gambiae ont été identifiés par la technique PCR, après extraction de l’ADN. Les enquêtes parasitologiques concernaient les enfants de 6 à 120 mois. Les analyses microscopiques et moléculaires ont respectivement permis de déterminer les densités parasitaires et les espèces plasmodiales présentes. La résistance d’An. gambiae s.l. à la deltaméthrine dans les villages était élevée, avec des taux de mortalité entre 20 et 90%. Des moustiques collectés sur appât humain, 26,7% appartenaient aux genres Anopheles. Anopheles gambiae s.l était le vecteur majeur du paludisme et An. Arabiensis représentait 92,0% des espèces de ce complexe. Le rôle d’An. rufipes dans la transmission du paludisme a été pour la première fois mis en évidence avec un Taux d’anthropophilie de 23,5 %, et un Taux d’Inoculation Entomologique de 0,5 pi/h/n), au côté d’An. funestus, An. pharensis et An. paludis. Le paludisme sévissait à l'état mésoendemique (Indice Plasmodique de 31,1%) dans la population d’étude. Les analyses multivariées ont montré que la résistance d’An.gambiae s.l. à la deltaméthrine n’avait aucun effet sur le taux d’infection des vecteurs du paludisme, ainsi que l’indice gamétocytaire. La présente étude suggère que la résistance d’An.gambiae s.l à la deltaméthrine n’affecte pas l’épidémiologie du paludisme dans la Région du Nord Cameroun. Cependant, le niveau de résistance élevé appelle à une surveillance permanente de la sensibilité des vecteurs aux insecticides, ainsi qu à la mise sur pied d’une politique nationale de gestion de cette résistance.